Quand le mental prend le dessus : L’histoire de Nafi Thiam

« C’est le brouillard dans ma tête. » Ces mots, lâchés par Nafissatou Thiam au micro de la RTBF, ont traversé bien plus que le stade de Tokyo. Ils ont résonné comme un rappel brutal de ce que beaucoup oublient : même les plus grands, même les plus solides, peuvent être pris dans le flou mental.

Triple championne olympique, double championne du monde, figure d’excellence, Nafi Thiam a bâti sa légende sur la constance, la maîtrise, et la sérénité. Mais à Tokyo 2025, le symbole s’est fissuré. Non pas par une défaillance physique, mais par un effondrement intérieur.

Et ce n’est pas un scandale. C’est une vérité humaine. Celle que tout athlète finit par rencontrer : le jour où le mental prend le dessus sur le reste.

Le brouillard mental : quand tout se brouille à l’intérieur

Dans son interview, Nafi parle d’un “nuage noir” qui l’a accompagnée tout au long de la compétition. Des pensées négatives, persistantes, qu’elle a tenté de chasser, de remplacer, d’ignorer. Mais plus elle luttait, plus ce brouillard prenait de la place.

“Je n’ai pas su être moi-même, la Nafi de toujours.”

Cette phrase dit tout. Quand l’athlète perd contact avec la version de lui-même qu’il connaît, celle qu’il retrouve habituellement dans l’arène, alors la performance devient secondaire. Le combat n’est plus contre les autres, mais contre soi-même.

Le brouillard mental, c’est ça : une perte de repères internes. L’attention se disperse, la confiance s’effrite, la voix intérieure change de ton. Ce n’est plus le discours du champion. C’est celui du doute.

Le poids invisible du contexte

Beaucoup ont réduit sa contre-performance à une simple “mauvaise compétition”. Mais ce serait nier l’essentiel : le contexte. Avant même de fouler la piste, Nafi arrivait déjà fragilisée par des tensions profondes avec sa fédération. Absence d’accréditation pour son kiné, restrictions autour de son staff, conflit autour d’un code de conduite… Des éléments périphériques ? Pas vraiment. Parce que ce qui entoure un athlète, c’est aussi ce qui nourrit son équilibre.

Le haut niveau ne se joue pas seulement sur la piste. Il se joue dans la qualité du climat mental qu’on crée autour de l’athlète. Et quand cet environnement devient instable, le cerveau ne ment jamais : il réagit.

La tête, le corps, et la rupture

Le mental, c’est ce qui unit toutes les dimensions de la performance : émotion, concentration, décision, confiance, mémoire, régulation. Quand un élément se dérègle, tout l’équilibre peut s’effondrer. C’est ce qu’on appelle la rupture psycho-corporelle. Le corps est prêt, mais l’esprit n’y est plus. Et dans ce décalage, tout devient plus difficile : la perception du temps, la précision du geste, la gestion de la fatigue. Ce n’est pas que l’athlète “n’a plus envie”. C’est que le lien entre l’intention et l’action s’est brisé.

Derrière la championne, une personne

Avant d’être une athlète, Nafi Thiam est une personne. Avec des émotions, des peurs, des doutes, et des besoins humains. Le sport de haut niveau a cette exigence cruelle : il t’expose au monde au moment même où tu te sens le plus vulnérable. Elle aurait pu forcer. Continuer “pour sauver les apparences”. Mais elle a choisi d’écouter son mental, de reconnaître que “ça n’allait pas”. Et ce choix-là, il faut le saluer. Parce qu’il demande un courage bien plus grand que celui de continuer à tout prix.

Chez AU MENTAL, on le dit souvent : la performance, c’est aussi savoir quand s’arrêter. Reconnaître ses limites n’est pas une défaite. C’est une preuve de lucidité, une étape de reconstruction. Préparer sa saison, ce n’est pas seulement accumuler les heures d’entraînement ou ajuster la nutrition. C’est apprendre à se comprendre. À anticiper les moments de doute. À reconnaître les signaux du stress, du désalignement, du trop-plein. C’est ce travail-là, invisible, qui te permet de rester stable quand tout autour vacille.

Le mental, c’est ton fondement. C’est lui qui donne du sens à ta discipline, de la cohérence à ton jeu, et de la force à ton identité. C’est aussi lui qui te ramène à toi quand tu te perds dans les attentes, les comparaisons, les jugements.

L’histoire de Nafi Thiam nous rappelle une vérité essentielle : peu importe ton talent, ton palmarès ou ta discipline — si ton mental n’est pas aligné, tout peut s’effondrer. Mais quand tu apprends à en faire ton allié, tu redeviens maître de ton histoire. Parce qu’au fond, tu es ton meilleur projet. Et ce projet-là commence à l’intérieur.

Andy Kawaya – Coach Mental, licencié en Psychologie.

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